email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

IFFR 2024 Limelight

Critique : Hammarskjöld

par 

- Per Fly propose un récit solide mais spéculatif sur l'ancien secrétaire général des Nations unies, dont la mort reste à ce jour nimbée de mystère

Critique : Hammarskjöld
Mikael Persbrandt (centre) dans Hammarskjöld

Dag Hammarskjöld, le deuxième secrétaire général de l'histoire des Nations Unies, a été considéré comme une référence pour ceux qui ont suivi. Parmi ses successeurs, seul Kofi Annan a également obtenu le Prix Nobel de la paix. Cependant, les circonstances de sa mort (son avion s'est écrasé alors qu’il se rendait à un sommet sur le maintien de la paix en Rhodésie du Nord, actuelle Zambie) ont laissé une partie de son histoire en suspens, nourrissant des théories du complot tortueuses et trouvant des échos dans le bourbier géopolitique actuel.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

En entreprenant de lui dédier un biopic, simplement intitulé Hammarskjöld, le scénariste-réalisateur Per Fly et son coscénariste Ulf Ryberg ont choisi un discours historique et une figure clef tellement captivants que rater leur coup eût été presque indéfendable : l'armature structurelle de leur travail était déjà en place. C'est ce qui ressort de leur film, très classique mais fluide – surtout une fois qu'on s'est habitué aux scènes américaines, moins convaincantes, ainsi qu'aux accents. Ce long-métrage a fait sa première internationale cette semaine à l'IFFR dans la section Limelight.

Le film de Fly est soigneusement positionné entre le panégyrique de Hammarskjöld en tant que celui qui était toujours le plus avisé dans la pièce et la suggestion qu'il s'est fait, en partie, l'architecte de son propre destin funeste, dans le sens où il serait devenu victime de son complexe du sauveur. Hammarskjöld, incarné par Mikael Persbrandt avec une froide réserve, a essayé d’apaiser toutes les parties en présence lors de la Crise congolaise, soutenant la décolonisation de l’Afrique mais laissant Patrice Lumumba, le premier président du pays élu démocratiquement, trop isolé sur le plan politique. Le Katanga (province du Congo belge) s'étant proclamé État indépendant (tout en restant une façade pour les intérêts maintenus de la compagnie minière belge Union Minière), Hammarskjöld y a envoyé la Force de maintien de la paix des Nations Unies, qui n'a pu nier qu'un coup d’État était en cours. Quittant le monde des cheveux bien peignés vers l'arrière et des costumes élégants des scènes censées se passer au siège de l'ONU (qui rappellent étrangement, sans le faire exprès, l'univers de Mad Men), le film n'hésite pas à déplacer, dans sa seconde moitié, l'action au Congo belge, créant une atmosphère dotée du bon niveau de paranoïa et de fatalisme. À mesure que le sang-froid de Hammarskjöld se met à flancher, on peut sentir dans les mouvements du regard de Persbrandt sa peur de ne plus jamais revoir son lieu d'adoption, New York, ni même sa Suède natale.

Quoiqu'il suive assez strictement les archives historiques, le scénario a aussi beaucoup puisé dans ce qui s'est dit sur Hammarskjöld après sa mort. S'ils ne vont pas tout à fait jusqu'à montrer une confession de ses ennemis, Fly et Ryberg affirment de manière convaincante que le secrétaire général des Nations Unies courait de gros risques face à des entités qui avaient déjà, avant cela, neutralisé sans ménagement d'autres ennemis politiques – et le fait de voir John F. Kennedy (Caspar Phillipson, dont il faut tout de même noter que c'est la troisième fois qu'il incarne JFK au cinéma, après Jackie [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film
]
et Blonde) se présenter à des briefings au siège de l'ONU aide à bien souligner la menace qui planait sur le monde politique en ces temps de Guerre froide et de constant poignardage dans le dos. On n'a pas non plus de preuve directe que Hammarskjöld était gay (quoique beaucoup le tenaient pour tel), mais il a droit ici à un ex-amant, à travers lequel il redécouvre sa passion pour la poésie. Ces deux éléments spéculatifs permettent d'humaniser cet homme extrêmement conscient d'être une personnalité publique constamment surveillée – comme les politiciens les plus habiles, les auteurs savent que la clarté rhétorique passe parfois avant l'indiscutabilité factuelle.

Hammarskjöld est une coproduction entre la Suède, la Norvège, le Danemark et l'Afrique du Sud qui a réuni les efforts d'Unlimited Stories, Nordisk Film Production AB, Sveriges Television AB - SVT, C More Entertainment AB, Nordsvensk Filmunderhållning AB, Maipo Film & TV Produksjon AS et DO Productions. Les ventes internationales du film sont assurées par Beta Cinema.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy