email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

FILMS / CRITIQUES France

Critique : Borgo

par 

- Dosant parfaitement film de prison, polar, portait de femme et immersion dans la société corse, Stéphane Demoustier signe un très bon long métrage porté par une excellente Hafsia Herzi

Critique : Borgo
Hafsia Herzi et Louis Memmi dans Borgo

"Ici, ce sont les détenus qui surveillent les gardiens et non l’inverse." Dans l’unité 2 de la prison corse de Borgo règne une atmosphère très particulière. Régime ouvert (les portes des cellules sont ouvertes de 7h à 19h), paix des braves tacite alors que les détenus sont rattachés des clans qui sont très loin de s’apprécier en dehors, "pas de noirs et d’arabes", cellules de 4 à 6 sauf pour les chefs qui sont seuls "avec vue sur la mer" : "ils s‘organisent comme ils veulent", "on n’est plus en France", "ils appellent ça le Club Med". C’est au cœur de cette micro-société carcérale quasiment en autogestion que Stéphane Demoutier (déjà apprécié avec Terre battue [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
et La fille au bracelet [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Stéphane Demoustier
fiche film
]
) a propulsé la protagoniste de son passionnant nouveau film, Borgo [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
, projeté hier en compétition au festival Reims Polar et qui sera lancé le 17 avril dans les salles françaises par Le Pacte.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)
Hot docs EFP inside

"Si ça continue comme ça, ça va mal finir". Mutée en Corse, l’expérimentée gardienne de prison Melissa (Hafsia Herzi) découvre l’ambiance on ne peut plus détendue de son lieu de travail (où on la surnomme rapidement Ibiza) qui contraste fortement avec le voisinage agressif ("tu as de la chance que je ne frappe pas les femmes") de la cité où elle s’est installée avec son compagnon Djibril (Moussa Mansaly) et leurs deux très jeunes enfants. Il faut dire que Djibril est noir et elle d’origine maghrébine, ce qui ne facile guère leur insertion dans une société très ancrée dans sa "corsitude". Mais comme "tout se sait ici", Saveriu (Louis Memmi), un sympathique détenu que Melissa avait croisé sur le continent, va aider la "matonne" à résoudre ses problèmes. Un service en entraînant un autre, Melissa s’engage alors sur une pente glissante tandis que pendant ce temps un commissaire (Michel Fau) tente de résoudre, à l’aide de vidéos de surveillance, une affaire de double homicide à l’aéroport…

Scénario rigoureux progressant habilement sur une double temporalité (écrit par le réalisateur avec la collaboration de Pascal-Pierre Garbarini), casting parfait (avec aussi Florence Loiret-Caille, Pablo Pauly, Cédric Appietto et un ensemble très convaincant de non-professionnels locaux) dans le sillage d’une Hafsia Herzi remarquable, sens du mystère et du non-dit laissant le spectateur libre de son interprétation, jeu sur la transparence finalement très relative de la télésurveillance en contrepoint de l’opacité humaine de la protagoniste principale, utilisation parcimonieuse mais très efficace et suggestive des extérieurs (bar sur la plage, maison isolée dans l’arrière pays, aéroport) : naviguant entre ses quatre cercles fermés (une femme en quête plus ou moins inconsciente d’autre chose dans sa vie, une enquête qui piétine, une prison avec ses règles, une île à la culture très spécifique), Borgo est une relecture subtile du cinéma de genre par un auteur intelligent qui affermit, discrètement et méthodiquement, film après film, une stature de cinéaste en impressionnante maturation.

Produit par Petit Film, Borgo est vendu à l’international par Charades.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy